11 août 2006

Sécurité vs. Profitabilité: les dilemmes du transport aérien

Les mesures de sécurité imposées aux voyageurs du transport aérien au lendemain des arrestations menées en Angleterre font pour l'instant l'objet d'un consensus, devant la menace terroriste apparemment imminente d'un 11 septembre bis. Cependant, cete belle unité de façade devrait céder la place dans les prochains jours ou les prochaines semaines à des appels plus ou moins voilés des compagnies aériennes et des aéroports afin de rendre moins restrictive la liste des produits autorisés en bagages à main.

C'est en effet tout le segment de passagers d'affaires qui risque de déserter les premiers rangs des cabines, préférant le confort des salles de téléconférence au parcours du combattant des contrôles de sécurité. On les voit mal laisser voyager en soute leurs précieux téléphones et ordinateurs portables, remplis de données commerciales confidentielles. La nature spartiate des conditions de vol imposées depuis 24 heures devrait constituer pour beaucoup un incitatif négatif. Par ailleurs, les ventes d'alcool des boutiques duty-free seront certainement inexistantes pendant toute la durée des restrictions, conduisant rapidement à des pertes de revenus considérables et à des licenciements. Les compagnies aériennes, qui commençaient tout juste à sortir la tête hors de l'eau vont certainement être touchées par une nouvelle vague de faillites spectaculaires.

Les pressions vont donc rapidement s'accumuler sur les autorités publiques responsables de la sécurité des transports pour lever les restrictions les plus incommodantes. Jusqu'à ce que l'on ait connaissance de la nature exacte de l'attaque planifiée, et de ses paramètres techniques, il est impossible de prédire quelles mesures de sécurité deviendront permanentes, et lesquelles seront discrètement abandonées. Cependant, la constance des groupes terroristes dans le choix du transport aérien comme cible privilégiée, et leurs efforts sans cesse renouvelés pour identifier les failles dans la protection des aéroports et des avions n'incite guère à l'optimisme.

PS: Dans son édition du 19 août, Le Monde propose un interview du Président de l'Association Internationale de l'Aviation Civile (265 compagnies aériennes) qui réclame la prise en charge intégrale des dépenses de sécurité par les gouvernements. On se demande s'il compte aussi partager les profits de ses membres avec les États, qui auront contribué à assurer la viabilité de leur modèle d'affaire... Le Figaro, quant à lui, décrit la polémique qui enfle entre les transporteurs anglais et les exploitats de l'aéroport, à qui ils comptent demander des dommages et intérêts pour la mauvaise gestion de la crise.
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Un article du Washington Post sur l'impact initial des nouvelles règles sur les magasins d'aéroports (les boutiques de bagages semblent s'en sortir).

Une réflexion intéressante sur la modélisation de ce type de risques.

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