29 octobre 2006

En bref

Un candidat au poste de directeur des écoles publiques de l'Oklahoma suggère que l'on recouvre les manuels scolaires d'une couche de kevlar, le matériau utilisé dans les gilets pare-balles, afin d'offrir aux élèves une meilleure protection en cas de fusillade dans leur école. Pourquoi ne pas carrément généraliser le port de l'uniforme, qui pourrait être fabriqué dans ce tissu miracle? (une vidéo de l'effet de tirs d'AK47 sur des manuels scolaires est visible sur le site en lien).

81% des entreprises américaines ont déclaré avoir perdu au moins un ordinateur portable au cours des 12 derniers mois, selon une étude réalisée par l'entreprise de consultant Vontu. 64% des 500 répondants ont affirmé que leur organisation n'avait aucune politique d'inventaire des données confidentielles sur support électronique, et 50% n'avaient pas la moindre idée d'ensemble concernant les politiques de stockage de l'information sensible (propriété intellectuelle, états financiers, contrats en négotiation...).

Christopher Soghoian nous explique dans son blog comment produire de fausses cartes d'embarquement afin de pénétrer dans les zones de sécurité des aéroports, et même dans les avions sous une fausse identité. Afin de faciliter la tâche des internautes et attirer l'attention sur cette brêche énorme du système de la sécurité aérienne, il avait même mis en ligne un site permettant de créer autant de cartes d'embarquement que nécessaire. Apparemment, le FBI n'a pas trouvé que c'était une bonne idée et a perquisitionné son domicile en lui demandant de fermer son site. La faille de sécurité elle reste toujours ouverte.

23 octobre 2006

Un réseau de capteurs acoustiques à Washington

La ville de Washington vient de se doter d'un réseau de capteurs acoustiques destinés à détecter et à localiser des coups de feu de manière instantanée. Cette technologie développée par l'entreprise Shotspotter utilise un réseau de capteurs de la taille de pots de peinture dissimulés sur le toit d'immeubles pour trianguler la position géographique de coups de feu. Ce système permettrait aux policiers d'arriver sur les lieux suffisamment rapidement pour augmenter leurs chances d'arrestation d'un suspect et les chances de survie des victimes, et tout particulièrement dans des quartiers sensibles où la routine de ce genre d'événement n'entraîne pas systématiquement d'alertes téléphoniques de la population à la police. Si d'autres villes ont déjà adopté cette technologie, le fait que cette expérimentation soit subventionnée par le FBI et qu'une évaluation positive permette d'envisager une généralisation à d'autres quartiers et d'autres villes risque de ne pas laisser les investisseurs insensibles. Le coût pour équiper une ville de la taille de Washington serait de plusieurs millions de dollars.

Une nouvelle forme de surveillance sonore, qui complèterait l'omniprésente surveillance visuelle des caméras vidéos, est-elle en train de voir le jour? Si les capacités actuelles de Shotspotter semblent incapables de reconnaître une voix dans la masse ou d'isoler une conversation distante, on doit bien avouer qu'une telle possibilité devient envisageable, et qu'il faudra peut-être bientôt faire attention aux paroles que l'on prononcera en public.

16 octobre 2006

La panique morale de la cybercriminalité

Le quotidien québécois La Presse publie aujourd'hui un article qui frise la mauvaise foi, et qui reflète la panique morale en train de s'établir autour du problème de la cybercriminalité. Le terme de panique morale a été pour la première fois utilisé en 1972 par un criminologue anglais, Stan Cohen, pour décrire:

"...une condition, épisode, personne ou groupe de personnes qui émerge en tant que menace aux intérêts et valeurs sociales (Cohen, 1972, 9). Ces menaces sont décrites de façon sensationnelle par les médias ainsi que d’autres agents de contrôle social, tels que les politiciens, la police ou les leaders religieux, avec l’intention d’établir des paramètres balisant les comportements acceptables (Welch, 2000)" (Neuilly et Zgoba 2005).

Dans l'article de La Presse, on apprend ainsi que la viabilité de la cyberéconomie canadienne serait menacée par la cybercriminalité galopante, et que cette préoccupation émane des plus hautes sphères du gouvernement, puisqu'elle s'appuie sur un document rédigé par des hauts fonctionnaires du ministère de l'industrie. Plusieurs chiffres alarmistes sont cités, dont celui d'un quart des états-uniens sur quatre qui serait chaque mois la victime d'une attaque destinée à voler son identité.. rien de moins! Chaque citoyen de notre voisin du Sud serait donc directement menacé pas moins de trois fois par an, de quoi en effet mettre l'économie dans tous ses émois. Une rapide consultation du site internet à partir duquel ce chiffre est tiré nous éclaire sur ce chiffre: les fonctionnaires fédéraux et le journaliste de La Presse entendent par "attaque visant à voler l'identité d'une personne" les courriels d'hammeçonnage que nous recevons par dizaines chaque semaine dans nos boîtes aux lettres électroniques.

La plupart des utilisateurs d'internet ne prêtent aucune attention à ces pourriels, et de nombreux fournisseurs d'accès les éliminent automatiquement avant même qu'ils atterrissent dans nos boîtes. Si ce type de pratique fait encore hélas toujours trop de victimes, des chiffres beaucoup plus réalistes réunis par le ministère de la justice des USA nous amènent à penser qu'environ 3,5% des foyers ont subi un préjudice financier sur une période de 6 mois en 2004 du fait d'un vol d'identité, et que la médiane des sommes perdues se situait aux alentours de 400$. Ces montants sont en général assurés ou remboursés par les institutions financières. Une augmentation a peut-être eu lieu, mais on reste encore loin de la menace généralisée décrite dans le rapport gouvernemental et l'article en question.

Un autre chiffre censé nous sensibiliser fait état de 40% des canadiens qui évitent d'acheter des biens ou des services sur internet pour des raisons de sécurité. Peut-être que les commerçants de quartier pourront tirer profit de cette situation et que cela permettra de maintenir encore pendant quelques temps des liens sociaux de proximité.
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Mélanie-Angela Neuilly et Kristen Zgoba, « La panique pédophile aux États-Unis et en France », Champ pénal, Responsabilité / Irresponsabilité pénale mis en ligne le 14 septembre 2005. URL : http://champpenal.revues.org/document340.html. Consulté le 16 octobre 2006.

12 octobre 2006

Documentaire sur le Taser

L'émission Enjeux, de la télévision de Radio-Canada proposait ce soir un documentaire très complet sur le Taser et les risques associés à son usage. Des études de cardiologues sont notamment citées, et la campagne de communication du fabricant qui participe à la construction du mythe de la létalité réduite est également trés bien exposée.
Le documentaire est disponible en visionnement et des liens additionnels sont proposés.

11 octobre 2006

Les dollars tombent du ciel pour les drones policiers

Le budget du ministère étatsunien de la sécurité intérieure (DHS) pour l'année 2007 prévoit d'attribuer 25 millions de dollars pour l'achat et la mise en service de drones de surveillance des frontières maritimes et terrestres du pays (ce qui inclut la frontière avec le Canada). Cette décision n'a donc pas été affectée par l'écrasement d'un tel engin en avril dernier en Arizona, qui avait soulevé la question de la sécurité entourant l'utilisation de ces aéronefs sans pilotes dans des environnements non-guerriers. Plus récemment, deux drone belges de la force de paix EUFOR se sont écrasés au Congo dans la capitale Kinshasa, le plus récent incident ayant tué une personne et en ayant blessé deux autres. L'Autorité Fédérale de l'Aviation (FAA) américaine, consciente de nombreuses questions encore non résolues sur ce point a d'ailleurs signifié au Shériff de Los Angeles qui prévoyait de tester son propre drone la nécessité d'obtenir un permis de vol spécifique avant de poursuivre toute expérimentation. De plus, la FAA a mandaté la société Lockheed Martin afin de l'aider à intégrer ces nouveaux objets volants au trafic aérien civil déjà passablement congestionné. Petit détail d'importance, Lockheed est l'un des principaux fabricants de drones aux USA. Cela n'aidera certainement pas à une évaluation objective de l'efficacité de ces outils pour des missions policières, qui laisse certains observateurs tel que l'Inspecteur du DHS dubitatif. Celui-ci a en effet déclaré au Congrès américain en décembre 2005 que les drones, en raison de la maintenance requise et de leur fragilité structurelle coûtaient environ deux fois plus cher à utiliser que des aéronefs avec pilotes. Cette voix discordante n'a visiblement pas eu un grand impact sur les législateurs.

06 octobre 2006

La vérité sur les listes de passagers aériens suspects

Dimanche prochain, la chaîne CBS diffusera dans son émission "60 minutes" un reportage sur les listes de passagers aériens interdits de vol, qui ont été instituées au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Ces listes ont été constituées dans l'urgence en fusionnant toutes les bases de données des services de renseignement et de police, et sans qu'une réflexion très poussée sur la fiabilité des informations qu'elles contiennent n'ait été menée. Toute personne ayant à un moment ou à un autre été en lien avec un individu ou une entité soupçonnée de terrorisme, ainsi que tous ses homonymes, sont associés par défaut à la catégorie des menaces potentielles à la sécurité nationale et font l'objet de contrôles accrus dans les aéroports, confinant parfois au harcèlement. Maher Arar, arrêté par les autorités américaines lors d'une escale aux USA et expulsé vers la Syrie pour y être torturé sur la foi de renseignements erronés transmis par le gouvernement canadien représente certainement un exemple extrême du préjudice qui peut résulter de cette pratique lorsqu'elle est mal appliquée et mal encadrée.

L'enquête de "60 minutes" fait ainsi apparaître que la liste principale utilisée en mars 2006 comportait les noms de personnes dont on peut douter qu'ils représentent une grande menace terroriste, comme Saddam Hussein (en prison en Irak), Nabih Berri (président du parlement libanais) ou Evo Morales (président de la Bolivie). Par ailleurs, les noms de certains membres d'Al Qaeda activement surveillés par les services de renseignement occidentaux et arabes ne figurent pas sur ces listes, pour éviter des fuites concernant des opérations en cours... On peut quand même être rassuré, le nom d'Osama ben Laden est bien présent (avec deux orthographes différentes), au cas où il déciderait de rendre une petite visite à ses sympathisants américains.