Dans un éditorial corrosif du Toronto Star, Thomas Walkom s'interroge sur les différences d'attitudes de la presse et de l'opinion publique canadienne vis-à-vis de la surveillance accrue de la population mis en eouvre par les services de renseignement depuis le 11 septembre 2001: alors que chaque révélation d'un nouveau programme mené par la CIA ou la NSA au États-Unis est traité comme une atteinte potentielle aux droits fondamentaux et reçoit un traitement en profondeur de la part des journalistes (qui bien souvent en révèlent l'existence), de ce côté-ci de la frontière, les inquiétudes manifestées par les organes de contrôle des services de sécurité restent lettre morte.
Par exemple, dans son rapport annuel, la Commissaire à la protection de la vie privée a tancé l'Agence des services frontaliers pour la manière cavalière dont certaines informations personnelles étaient communiquées à leurs homologues états-uniens. Cette semaine, l'ancien juge de la Cour suprême et Commissaire du Centre de la Sécurité des Télécommunications Antonio Lamer, vient également dans son dernier rapport annuel soulever un certain nombre d'inquiétudes quand à la manière dont les demandes de mises sur écoutes impliquant des citoyens ou des résidents canadiens sont rédigées (en des termes très généraux), impliquant que le CST pourrait violer l'esprit de la loi qui autorise ses activités et empiéter sur les libertés des Canadiens (pour un exposé plus détaillé sur les activités du CST, voir le blog Lux ex Umbra). Enfin, les informations sur les transactions financières canadiennes suspectes dépassant 10.000$ sont routinièrement échangées avec des services de renseignement étrangers, sans que la presse paraisse s'en émouvoir.
Loin de partager l'analyse de Walkom, qui attribue à la pesanteur bureaucratique canadienne et à la meilleure gestion de la divulgation de telles informations par le gouvernement, c'est plutôt le manque d'intérêt de la presse canadienne pour les longues et coûteuses enquêtes d'investigation qui me semble être en grande partie à l'origine de cette apathie. Une telle attitude est d'ailleurs observable également en France où la presse semble souvent relayer les informations qui lui sont transmises par des officines plus ou moins bien intentionnées, plutôt que de se lancer en quête d'informations inédites. L'affaire Clearstream me semble en cela symptomatique d'un journalisme de confort ou de connivence qui s'oppose à un journalisme de "sources" encore bien vivant dans certains grands journaux états-uniens.
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