21 janvier 2006

Moteurs de recherche et conservation des données

Le mercredi 18 janvier 2006, on apprenait que le ministère de la justice américain avait demandé un an plus tôt à Google, le moteur de recherche le plus utilisé par les internautes, de lui communiquer le contenu de ses bases de données[1]. Les avocats du ministère désiraient obtenir la liste de tous les termes ayant fait l’objet d’une recherche pendant une semaine typique d’activité, afin de démontrer le peu de protections offertes en ligne aux mineurs qui souhaitaient accéder à des sites pornographiques. Le refus de Google d’obtempérer rendit l’affaire publique, mais d’autres moteurs de recherche (Yahoo, Microsoft et AOL) n’eurent pas les mêmes états d’âme.

Un article publié par le site internet Wired nous apprend comment nos recherches sur ces moteurs sont conservées en mémoire et peuvent être utilisées à notre insu[2]. La conservation et l’analyse de l’ensemble des données reliées à nos recherches servent initialement à raffiner les résultats qui nous sont retournés, ainsi que les publicités qui les accompagnent. La mise en relation de nos recherches présentes et passées permet ainsi à ces entreprises de contextualiser nos intérêts et d’en dresser une liste exhaustive. Afin d’y parvenir, un identifiant unique (le célèbre cookie) est implanté par la plupart des sites commerciaux sur notre ordinateur afin de suivre chacun de nos mouvements. La durée de vie de ces programmes est variable, mais le cookie actuellement utilisé par Google expire en 2038 et celui des sites du gouvernement du Québec en 2034.

La plupart des moteurs de recherche offrent également des services additionnels de courrier électronique gratuit ou de messagerie instantanée, qui requièrent des utilisateurs qu’ils ouvrent un compte après avoir fourni quelques renseignements obligatoires tels que leur nom, leur date de naissance, leur adresse et certains de leurs goûts personnels. Les fréquences et durées de connexion des utilisateurs, ainsi que les adresses de leurs contacts et les recherches effectuées peuvent être mises en relation afin de produire des profils beaucoup plus détaillés.

Bien que la motivation principale de ce souci de connaissance soit avant tout commerciale, les services de police et de renseignement ne sont pas insensibles à leur potentiel. Un homme jugé en novembre 2005 en Caroline du Sud pour le meurtre de sa femme a ainsi du expliquer au tribunal les traces de recherches qui avaient été découvertes dans ses ordinateurs portant sur le meilleur moyen de briser le cou de quelqu’un, et sur les marées et les accès nautiques au lac dans lequel on a retrouvé le corps de sa conjointe[3]. Dans les pays où la liberté d’expression n’est pas garantie, de telles informations peuvent constituer un puissant outil de contrôle pour les forces de l’ordre.

Les utilisateurs d’internet qui souhaitent garder privée la nature de leurs recherches peuvent supprimer périodiquement les cookies se trouvant sur leur ordinateur, ou faire usage d’un système de connexion internet anonyme tel que les logiciels TOR[4] ou Anonymizer[5]. Le site www.anonymat.org offre également de nombreuses solutions de préservation de la vie privée lors de nos incursions dans le monde virtuel.


[1] http://www.mercurynews.com/mld/mercurynews/news/13669361.htm, consulté le 21 janvier 2005.
[2] http://www.wired.com/news/technology/1,70051-0.html, consulté le 21 janvier 2005.
[3] http://www.wral.com/news/5287261/detail.html, consulté le 21 janvier 2006.
[4] http://tor.eff.org/index.html.fr.
[5] http://www.anonymizer.com/.

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